Créature de la nuit.
Je suis une créature de la nuit.
On veut me forcer à entrer dans la lumière.
On veut m'observer, me disséquer, m'analyser.
Peu leur importe si je souffre, si je brûle, si je meurs.
Incapables de supporter l'existence de l'obscurité,
ils veulent tout blanchir, tout purifier, tout appauvrir.
Pain blanc, oeufs blancs, farine blanchie,
sucre blanc, cheveux teints, cerveau bleaché.
Ils souhaitent que le laser de leur morale
grille les neurones de mes valeurs.
Ils souhaitent que nous payions pour manger du carton
et que nous souriions en les en remerciant.
Ils souhaitent nous aveugler de leur lumière artificielle
en nous faisant croire que cela nous éclaire le chemin.
Ils veulent nous faire croire qu'il n'y a qu'une seule
façon de vivre et que la vie est unidimensionnelle.
Ils veulent tout séparer et tout encadrer afin de
tout contrôler alors que rien ne se sépare de la vie.
La vie forme un tout indestructible, aucune matière
ne se perd, la philosophie n'est pas séparable de la
science et la pensée, l'émotion et le corps ne font qu'un.
Alors, chemin faisant, j'avais la paix mais dès qu'ils entrevirent
une fissure leur permettant de faire pénétrer leur lumière intoxicante
afin de s'immiscer dans ma vie et de la contrôler par quelque vulnérabilité,
ils sourièrent, enfin capables d'user de pouvoir sans but contre moi.
Leur lumière mortelle s'introduit dans la fissure
et tel un laser découpa ma chair tendre faisant saigner mon coeur
mais ma pensée demeure intacte et au contraire bien ravivée.
Alors je les regarde avec leur fausse morale et leur fausse lumière
se vautrer dans le pouvoir éphémère que le hasard a mis
entre leurs mains et je les vois utiliser mensonge et infâmie
afin d'arriver à leurs fins bien plus obscures que la plus obscure des nuits
et pourtant en pleine lumière éblouissante et je me dis que tôt ou tard
la lame de la guillotine de la vérité tombera car la lumière se consume
et finit par s'éteindre alors que la nuit est éternelle.
Ils ont peur de la nuit, ils ont peur de l'éternel,
ils ont peur du noir, ils veulent tuer l'obscurité.
Nous ne sommes pas dans un pays libre,
la liberté n'existe pas en ce pays,
ce pays n'existe même pas
et on vous a fait croire que cela fait votre affaire.
Il est interdit de penser, il est interdit de questionner,
il est interdit de remettre en question, il est interdit d'interdire
les crimes légaux, il est interdit de ne pas suivre les lois criminelles,
il est interdit de vivre la nuit, il est interdit d'être obscur.
On me tolère, on cherche la fissure, on la trouve, on s'immisce,
on me torture, enfin capables, mes tripes, mon coeur, tout saigne,
tout se consume dans leur lumière souriante et gentille.